Les clubs de modélisme ferroviaire en France et leur empreinte numérique

Un article de fond – et donc exceptionnellement sans image – sur l’empreinte numérique des clubs de modélisme ferroviaire et les quelques enseignements qu’il est possible d’en tirer. Loin de l’image parfois un peu surannée que draine le modélisme ferroviaire, un examen attentif de leur présence sur la toile montre une vitalité renouvelée. En effet, un nombre non négligeable de clubs ont développé une vraie stratégie numérique. Si cette synthèse s’appuie principalement sur un inventaire des sites internet et des comptes Facebook, il faudrait aller plus loin – ces deux vecteurs numériques sont déjà anciens – et faire aussi l’inventaire des comptes Instagram et des chaines Youtube des clubs. 

La question liminaire : comment trouver un club de modélisme ferroviaire ?

Au départ, une question assez simple : à quels moyens, un amateur passionné – jeune ou moins jeune – et qui a envie de partager sa passion avec d’autres, peut-t-il recourir pour trouver un club ou une association de modélisme ferroviaire en France ? Si la question parait simple, il s’est avéré qu’y apporter une réponse l’était beaucoup moins. Bien entendu, on peut penser que les différents sites, forums et blogs consacrés au modélisme ferroviaire fournissent une réponse rapide et immédiate. C’est le cas en partie mais ces sites – dont les références sont pour la plupart basées sur du déclaratif – ne peuvent pas fournir un état exhaustif des structures en place. De plus, il est impossible de les tenir à jour et il est apparu que nombre de liens proposés étaient obsolètes ou inopérants.

La méthode de recensement

Comme indiqué en introduction, les bases existantes ne sont que très partiellement fiables – le nom du club est un point d’entrée mais notoirement insuffisant – et il a donc fallu quasiment partir de zéro et ratisser la toile avec les entrées « club modélisme ferroviaire » ou « association modélisme ferroviaire » département par département ![1] L’entrée « bourse modélisme ferroviaire » a aussi donné de bons résultats. Il s’agit d’une source de financement privilégiée des clubs et rares sont ceux qui n’en organisent pas régulièrement. Cela a été un travail de titan, qui a pris plusieurs dizaines d’heures : on tombe sur des erreurs 404, sur des pages qui n’existent plus et puis parfois, on retrouve la trace du club sur un nouveau site… Certains ont changé de nom, ont disparu ou ont fusionné. Rien de bien anormal mais l’accès numérique a les défauts de ses avantages : il a fallu croiser les sources et les informations pour constituer une base saine…

[1] Les parcs d’attraction, musées et associations de mise en valeur du patrimoine ferroviaire n’ont pas été comptabilisés sauf s’ils comportaient une activité de modélisme ferroviaire.

Et ses limites…

La méthode a de nombreuses limites et si le ratissage par département a été systématique, le résultat obtenu n’a aucune prétention à l’exhaustivité.

Il est évident que de nombreux clubs sont passés à travers les mailles du filet. C’est notamment difficile de repérer des sections de modélisme ferroviaire au sein d’associations multi-activités : l’empreinte numérique sur la toile peut être nulle ou invisible.

Un autre écueil est le référencement de certains sites. Il est surprenant de constater à quel point certains sites sont remarquablement fournis et entretenus, et à quel point il a été parfois difficile de les repérer ! Ainsi, en effet, l’empreinte numérique ne dit rien de la qualité du travail d’un club mais davantage sur les algorithmes de référencement des moteurs de recherche.

On peut indiquer encore qu’un nombre non négligeable de sites sont vieux de 15 ou 20 ans, développés au glorieux temps du langage html, certains n’étant plus remis à jour depuis longtemps. Possédant néanmoins une empreinte numérique, ils ont été comptabilisés mais il est difficile d’établir avec certitude s’ils sont encore actifs. Le cœur d’un club est l’activité de modélisme et moins la gestion d’un site internet. Mais il faut aussi remarquer que de nombreux sites sont construits à l’aide des derniers outils de développement et sont remarquables à tout point de vue : qualité visuelle, richesse des informations, navigation ergonomique, respect du RGDP, etc.

Dernier point à souligner : de plus en plus de clubs communiquent au travers d’un compte Instagram ou en publiant des vidéos via leur chaine YouTube. Il n’a pas été procédé au recensement de ces nouveaux vecteurs mais ils sont aussi un moyen pour les clubs de se faire connaitre, moyen promis probablement à un développement important dans les années à venir et qui touche plus facilement les plus jeunes.

Quelques résultats en chiffres

Selon la méthode indiquée, 286 structures (clubs, associations ou sections) de modélisme ferroviaire ont été identifiées (vous les trouverez ici. Bien entendu, ce chiffre vaut à la date de parution de l’article alors que l’annuaire est en constante évolution).

Sur ces 286 clubs, 43 ont une empreinte numérique faible : c’est-à-dire qu’ils n’ont pas de site dédié, de blog ou de compte Facebook. Pour ces clubs, l’empreinte numérique est autre et diverse. Autrement dit, en fouillant un peu la toile (beaucoup parfois…), on finit par en trouver une trace : article dans un journal de la presse quotidienne régionale, club référencé au sein du site communal ou au sein d’une association multi activités, vidéos disponibles sur YouTube ou Dailymotion, compte Twitter, organisation d’un évènement, d’une bourse d’échanges ou d’une exposition, etc.

243 clubs ont donc par voie de conséquence une empreinte numérique moyenne à forte. 212 clubs ont un site dédié et 83 clubs ont un compte Facebook (le total est supérieur à 243 car de nombreux clubs possèdent à la fois un site dédié et un compte Facebook). Cela veut dire que l’immense majorité des clubs (85%) est facilement accessible via la toile : le test a été fait systématiquement pour chacun des liens pour vérifier qu’ils étaient opérationnels. C’est un résultat plutôt flatteur et qui témoigne d’une vraie vitalité du modélisme ferroviaire, peut être au-delà de ce que les passionnés eux-mêmes pourraient croire.

Quelques graphiques pour illustrer ces chiffres :

Pourcentage de clubs disposant d'un empreinte numérique moyenne à forte 85%
Pourcentage de clubs disposant d'un site internet 74%
Clubs avec compte Facebook 29%

 

Alors bien sûr, ce résultat global cache quelques disparités : les grands centres urbains sont beaucoup mieux servis que les zones diffuses. Certaines régions sont mieux fournies que d’autres, les clubs de modélisme ferroviaire témoignant aussi en partie de l’empreinte et de l’histoire du chemin de fer en France.

Voyons cela d’un peu plus près !

La couverture géographique

Commençons par les départements où aucune trace numérique n’a été trouvée, en espérant un démenti rapide : pas de club de modélisme ferroviaire décelé en Corse, en Creuse, en Haute Loire, dans le Lot, et en Haute Saône (ces départements sont aussi parmi ceux où la densité de population est la plus faible). Ce qui signifie surtout que 95 % des départements sont dotés d’au moins un club.

Certains départements en revanche sont particulièrement dotés : la palme revenant au département du Nord avec 18 clubs, suivi par la Seine et Marne avec 9 clubs, le Val d’Oise et l’Oise avec 8 clubs, l’Isère et l’Essonne avec 7 clubs.

En regroupant les départements au sein de leur région d’appartenance respective, on obtient le tableau suivant : nombre de clubs par région

Hauts de France

Normandie

Grand Est

Ile de France

Bretagne

Pays de la Loire

Centre Val de Loire

37

12

33

44

9

11

19

Bourgogne Franche Comté

Nouvelle Aquitaine

Auvergne Rhône Alpes

Occitanie

Provence Alpes Côte d’Azur

Corse

14

30

42

20

15

0

Il faut en outre remarquer que certains départements plutôt ruraux et éloignés d’une capitale régionale sont plutôt bien dotés : 4 clubs dans l’Aisne, 3 en Ardèche, 4 dans le Gard pour ne citer que ces trois exemples. Il n’y a donc pas de fatalité pour les zones diffuses.

Mais continuons à nous placer du point de vue du passionné de modélisme ferroviaire qui veut rejoindre un club et demandons nous quelle est la nature de l’effort que doit faire un modéliste pour rejoindre un club ? (Le calcul postule que les clubs et les habitants sont uniformément répartis au sein des régions, ce qui est bien entendu inexact). Ce n’est pas un surprise, les passionnés d’Ile de France sont les mieux lotis. En revanche, les passionnés d’Occitanie, de Bretagne, de Bourgogne Franche Comté, des Pays de la Loire et de Nouvelle Aquitaine devront parcourir trois fois plus de distance.

À l’heure où l’on peut jouer aux jeux vidéo en réseau depuis son domicile, où la plupart des communes disposent d’un club de sports à moins de 5 kilomètres, la concurrence s’avère rude dès lors qu’il faut faire plusieurs dizaines de kilomètres pour rejoindre un club de modélisme.

Le nombre de modélistes ferroviaires en club

Parmi les 212 clubs ayant un site dédié, 56 indiquent leur nombre de membres soit plus du quart. En faisant un calcul rapide sur la base de cet échantillon, on peut estimer à environ 7000 le nombre de modélistes ferroviaires attachés à un club. Chiffre probablement surévalué, on peut formuler l’hypothèse que les clubs ayant fait l’effort de construire leur propre site sont aussi ceux qui ont le plus de moyens, y compris humains. Et il s’agit de chiffres déclaratifs avec une incertitude entre les adhérents, les membres, les membres actifs.

Il est d’ailleurs difficile de vérifier cette estimation. Peu de données – et pour la plupart anciennes – relatives à la pratique du modélisme ferroviaire sont  disponibles et celles qui existent demanderaient à être mieux objectivées. Voilà ce que fournit la page Wikipédia sur la question :

« En France, le nombre de modélistes ferroviaires est estimé à environ 30 000 en France (2005), hors collectionneurs. Une affirmation non datée sur le site de LR presse donne un total de 50 000 pratiquants en France. La Fédération française de modélisme ferroviaire indique sur son site regrouper plus de 130 clubs et 250 individuels, soit plus de 2000 personnes (2020). »

On peut rajouter au débat le nombre d’inscrits à trois des forums français les plus fréquentés : un peu moins de 8000 pour le premier, 12000 pour le suivant et un peu moins de 14000 pour le dernier, chiffres qui mixent bien entendu membres de clubs et pratiquants individuels, et aussi les forumeurs d’autres pays francophones. On peut formuler l’hypothèse que le développement de ces forums depuis une vingtaine d’années permet de créer une communauté alternative – certes à distance – à celles des clubs.

Le chiffre – pourtant le plus récent – fourni par la fédération apparait faible. L’explication la plus évidente est le nombre de clubs affiliés à la fédération, qui représente moins de la moitié des clubs recensés (286). En faisant un prorata, on arriverait ainsi à un chiffre plus proche des 4300 pratiquants en club, alors que le recensement conduit à une hypothèse – certes haute – de 7000 membres. La vérité se trouve probablement entre les deux !

De toutes ces estimations plus ou moins fiables, un constat s’impose : le nombre de modélistes ferroviaires faisant partie d’un club est minoritaire parmi l’ensemble des modélistes ferroviaires. Un membre de club me faisait remarquer récemment : « un distributeur de presse local vend plusieurs dizaines de revues, aucun membre de notre club est client chez cette personne ». Faut-il s’en étonner, s’en réjouir ou au contraire le regretter ? Souhaitons que cet article puisse ouvrir un débat fécond !

Une synthèse plus qualitative reste à faire

Au gré de la navigation au sein de tous ces sites, on constate surtout une richesse foisonnante et inattendue, qui mériterait d’être capitalisée. Ainsi, il serait intéressant de recenser les échelles pratiquées, le nombre de réseaux dont les réseaux modulaires et ceux prévus pour être exposés, les technologies pratiquées (impression 3D, découpe laser, découpe chimique, etc.), les articles, tutoriels et vidéos disponibles, les évènements organisés, etc. Certains clubs ont développé des sections jeunes, certains revendiquent même une section femmes, d’autres encore publient un bulletin ! Autant de critères qui permettraient d’encore mieux démontrer le dynamisme du modélisme ferroviaire en clubs. Ce recensement plus qualitatif est un travail long et minutieux que je n’ai pas eu le courage de faire. 

Mais la navigation montre aussi de-ci de-là quelques difficultés qui sont aussi en partie celles de la vie associative : les photos montrent le plus souvent des crânes dégarnis et des tempes grisonnantes, les problèmes de locaux sont régulièrement évoqués, les moyens de la plupart des clubs sont très limités et les appels aux dons et au mécénat sont récurrents. Le coût de l’adhésion annuelle reste pourtant modique, entre 30 et 50 euros pour la plupart des clubs. Soit guère plus qu’un abonnement mobile et internet mensuel cumulé ! Alors que le prix du matériel atteint parfois des sommes vertigineuses, la pratique du modélisme ferroviaire en clubs reste un loisir accessible.

Sans conclure définitivement, on peut affirmer que le modélisme ferroviaire est plein de vitalité et que beaucoup de clubs ont pris le virage du numérique à tout point de vue : sites dédiés, présence sur les réseaux sociaux (Youtube, Instagram, etc.), utilisation des nouvelles technologies disponibles (impression 3D, découpe laser) dans leurs projets de modélisme. On peut à cet égard remercier les bénévoles particulièrement investis qui, avec des moyens pourtant souvent modestes, font vivre et perdurer notre loisir.

Je remercie chaleureusement les clubs qui ont bien voulu lire les premières versions de ce texte, notamment l’Association Bigourdane des Chemins de Fer Miniatures et l’AMCF78. Leurs précieux commentaires m’ont permis de finaliser cet article.

Merci de votre lecture, laissez-moi un commentaire si le cœur vous en dit et à bientôt !

Cet article a 4 commentaires

  1. CHAMBON

    Bonjour : voila 13ans que notre section du centre laïque c’est affiliée à la FFMF, nous réalisons réseaux en N et HO en analogique
    avec pas mal de récupération….nous participons à des expos et une première au 70eme anniversaire de la FD : une belle fête…
    Nous organisons notre propre expo les 9 et 10 décembre 2023 la 14 eme édition .
    bravo pour votre synthèse sur l’évolution du modélisme qui reste une activité couteuse vue le des prix des matériels…
    bien cordialement

    1. Rédacteur du Blog

      Bonjour Gérard,
      Je vous remercie pour vos encouragements. Je me souviens de votre participation à Federail cette année et de l’exposition de vos deux réseaux. Les sections de modélisme ferroviaire attachées à une structure plus importante (amicale laïque dans votre cas ou clubs multi-activités) ne sont pas toujours faciles à repérer et les expositions sont un bon moyen de valoriser leur travail.
      Je vous souhaite le plein succès pour votre exposition de décembre.
      Au plaisir de vous lire une prochaine fois.
      Salutations cordiales

  2. LONGHI

    Il pourrait être utile d’avoir une répartition par tranche d’age. La population est elle vieillissante, stable, jeune… C’est un élément important sur une petite population. Sans jeunesse il n y aura pas d’avenir.
    Il faudrait il aussi mesurer la répartition par activité, ceux qui pratiquent, ceux qui collectionnent, ceux qui juste s’intéressent.
    Il faut aussi voir la réalité des clubs, pour l’avoir testé, certains revendiquent X personnes mais en fait pas la moitié sont réellement actif. Dans les expos et les bourses c’est toujours les mêmes têtes….

    1. Rédacteur du Blog

      Bonsoir monsieur,

      Merci pour cet autre commentaire.

      Je suis d’accord avec vous : il faudrait pouvoir étudier plus avant la démographie des membres de clubs car cet article se limitait à une analyse des clubs. Il ne m’est pas possible d’aller plus loin que ce que j’ai tenté dans cet article.

      Au plaisir d’échanger à nouveau une prochaine fois avec vous

      Salutations cordiales

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