Une vieille façade fatiguée

La patine est un sujet qui paraît souvent complexe et de ce fait, qui rebute nombre de modélistes. Il faut tout d’abord segmenter le sujet en faisant remarquer que la patine du matériel roulant par exemple, ne présente pas les mêmes enjeux que la patine des bâtiments. Certains peuvent avoir un peu de mal à envisager de « barbouiller » une locomotive vapeur dernier cri pour laquelle ils ont allègrement déboursé 500 euros. On peut aussi faire remarquer que certaines patines sont réversibles et d’autres beaucoup moins. On trouve les supporters de la patine à l’aérographe, au pinceau, à la terre à décor, que sais-je encore. Enfin, on peut aussi avancer que de nombreux produits divers et variés destinés à la patine sont apparus sur le marché, notamment issu du modélisme militaire ces dernières années ; profusion qui peut finir par perdre les modélistes.

Cet article est plutôt à considérer comme une introduction à un sujet qui est vaste. Une introduction car son objet va concerner la façade d’un vieux kit en plastique sur lequel une patine massive va être pratiquée. C’est en effet plus facile de procéder à une patine généreuse qu’à une patine subtile. Une introduction aussi car il ne va être utilisé que des produits accessibles et des techniques simples. Il s’agit donc d’une bonne façon d’aborder ce sujet.

Niveau de difficulté : débutant

Matériel nécessaire : une façade, un mur, une situation à patiner 

Matériel optionnel : grille métallique fine, volets à persiennes

Outillage nécessaire : cutter, pinceaux, pastels secs, peinture pour maquettes, Gesso

Cette photo montre le résultat final. En fait, pas tout à fait ! Les traces vertes ont été un peu exagérées pour illustrer le propos. Il sera recommandé de passer quelques lavis de terre d’ombre brulée, de gris anthracite ou de noir pour lier le tout et atténuer l’effet. Notez néanmoins que c’est à chacun de choisir le niveau de patine qu’il souhaite illustrer.

Le modèle de base

Il s’agit d’un kit en plastique. Comme on peut le constater la façade de cet immeuble en ruine est bien propre et va donc être toute indiquée pour subir les pires outrages du temps ! Comme vous allez le voir, j’ai aussi souhaité y apporter quelques améliorations supplémentaires pour la rendre plus réaliste. Ces suggestions sont facultatives : surtout faites vous plaisir !

Voilà le (très vieux…) kit dont l’une des façades va illustrer l’article. J’ai une certaine tendresse pour ces vieux kits que l’on peut encore attraper à prix raisonnables sur des bourses, des brocantes ou sur des sites bien connus de ventes en ligne de matériel d’occasion.

Première étape : peintures de quelques éléments de façades

Vous pouvez procéder à la même opération pour le mur en pierre du rez-de-chaussée. Dans les deux cas, les couleurs utilisées sont données à titre indicatif et vous pouvez choisir d’autres options.

La façade laisse apparaitre quelques briques (?) qu’il peut être utile de peindre avec différentes couleurs pour donner un peu de variété. 

Deuxième étape : quelques améliorations pour rendre la maquette plus réaliste

Les bas de façade

Ces vieux immeubles présentent tous des petites portes en bas de façades vers les sous-sols et caves (aération ? possibilité de livrer le charbon ? autres ?). J’ai reproduit ces détails avec un peu de grille métallique fine encadrée par de petits profilés plastique.

Les fenêtres du RDC

Autre apport un peu original par rapport au kit de base : les fenêtres du RDC ont été murées avec un peu de carte plastique représentant de la brique. Vous pouvez aussi faire cela de toute pièce avec un morceau de carton plume comme je vous l’avais évoqué ici. Compte tenu de l’état de l’immeuble, cette option est plutôt crédible et surtout, apporte de la variété à la façade. 

Les fenêtres

Les fenêtres fournies avec le kit ne sont pas ridicules. Je les ai traitées avec un peu de pastel sec réduit en poudre, mélangé à du Gesso (du médium acrylique doit aussi faire l’affaire) et un peu d’eau. Vous pouvez badigeonner vos huisseries avec cette préparation en utilisant différentes couleurs (gris, beige, etc.).

Les volets à persiennes

Faites très attention cependant à bien laisser sécher vos différentes couches de lavis. Il s’agit de papier et le risque de déformation est grand ! Au besoin, placez-les dans du papier absorbant sous un poids quelconque pour éviter de les déformer.

Ces volets ont été fabriqués dans un FabLab dont je vous ai présenté les possibilités ici. Quelques planches avaient été réservées pour être découpées à la demande. Vous pouvez là aussi décorer ces planches avec des lavis de peinture. 

Comme vous pouvez le constater sur ce gros plan, un travail très détaillé a été effectué sur ces volets à persiennes. Observez la réalité et vous constaterez que ces volets sont rarement intacts, y compris sur des immeubles en bon état. La finesse de la découpe laser permet de quasiment traiter chacune des lames individuellement. Alors, bien entendu, c’est un travail de titan que certains trouveront parfaitement superflus et c’est leur droit le plus absolu. C’est néanmoins ce niveau de détaillage qui favorise le réalisme de ce genre de réalisations. Chaque volet a été traité différemment : certains ont été laissés intacts et d’autres ont été joyeusement esquintés ! À vous de choisir ce que vous souhaitez représenter !

Les vitres

Voilà ce que cela donne. Si vous regardez attentivement le résultat final, vous constaterez que chaque fenêtre a été traitée différemment de façon à donner de la variété à votre modèle. Là-aussi, faites comme bon vous semble…

Il est peu probable – compte tenu de l’état de la façade – que ces vitrages aient pu rester intact. Vous pouvez très facilement simuler des impacts sur des vitres ou des vitres cassées, en rayant la surface du plastique transparent.

Troisième étape : coulures, traces et patines

Vous pouvez souligner les fissures avec des lavis foncés (photo ci-dessous).

Et les traces de coulures de pluie (photos ci-dessus).

Comme je l’indiquais en introduction, l’offre de produits destinée à la patine est florissante et n’a cessé de croître depuis ces quinze dernières années. Je dois à la fois concéder que j’en utilise mais aussi reconnaitre que je suis parfois dubitatif sur l’apport réel de certains produits, eu égard notamment à leur prix. L’ensemble de ce qui a est présenté a été fait à l’ancienne : c’est à dire avec des pastels secs réduits en poudre. La boite ci-contre de 60 pastels a été dénichée en brocante pour 5 euros… Il y a de quoi faire, bien au delà de mes propres besoins !

Les lavis de couleur sont fabriqués au fur et à mesure des besoins : des pastels secs sont réduits en poudre en frottant un cutter sur le bâton de pastel, un peu de Gesso et plus ou moins d’eau en fonction de la consistance voulue. Pour les traces d’humidité verdâtres par exemple, cette boite de pastels permet d’avoir recours à 14 nuances de verts différentes (bien entendu, je ne les utilise pas toutes mais observez attentivement un mur soumis à l’humidité , vous serez surpris par le nombre de nuances). Je vous laisse imaginer le nombre de produits du commerce nécessaire pour atteindre un nombre suffisant de nuances.

Voilà ce à quoi on arrive avec des lavis de camaïeux de verts pour les traces humides et des lavis de terre d’ombre brulée et de noir pour les murs. La technique est la suivante : souligner d’abord les traces humides avec vos différents verts en utilisant un pinceau très fin, laissez sécher et passer vos couches de lavis foncé sur l’ensemble de la façade. 

Une fois que tout est bien sec, vous pouvez ajuster les nuances de verts et de couleurs foncées selon le résultat que vous souhaitez obtenir. On sort de la technique pour aller vers l’interprétation : c’est à chacun de choisir le niveau de patine qu’il souhaite représenter. Deux derniers conseils : terminez toujours par un lavis sur l’ensemble de votre façade pour bien lier les différents apports que vous aurez pu faire et procédez par plusieurs couches successives. Vous maitriserez ainsi beaucoup mieux la progression de votre travail.

Eléments de conclusion

Est-il besoin de beaucoup de commentaires ?

Quelques remarques néanmoins avant de vous laissez vous mettre à la patine. Ces patines généreuses sont les plus faciles à réaliser et je vous invite ainsi à commencer par celles-ci. Vous apprendrez ainsi les techniques de base et vous pourrez après vous lancer dans des projets de patine plus délicats. Avec la méthode suggérée, le coût est modique pour ne pas dire négligeable ! Vous devez tous bien avoir dans le fond de vos cartons une maquette à laquelle vous pouvez faire subir ces pires outrages… Vous verrez même que ces opérations permettront d’en réhabiliter certaines !

Deux liens encore pour compléter cet article. Cette page, où l’animateur du site a rassemblé les magnifiques photos de banlieue parisienne prises par son père durant les années 50. Et le blog d’Emmanuel Nouaillier : le maître ! Merci de votre lecture, laissez-moi un commentaire si le coeur vous en dit, n’hésitez-pas à poser des questions si je n’ai pas été clair et à bientôt pour de nouvelles aventures !

Cet article a 2 commentaires

  1. Eric Suzanne

    Toujours ce mélange de rigueur et de volonté de transmettre. Sans oublier le côté low cost que permet le broillat de pastel auquel il fallait penser.
    Merci pour cette précision dans le texte qui permet une appropriation rapide du sujet.

    1. Rédacteur du Blog

      Bonsoir Eric,

      Merci de votre nouvelle visite et de ce gentil commentaire. J’espère surtout que ces conseils vous seront utiles. Je ne fais que présenter des techniques de patine connues, que le déploiement généreux et récent de produits « prêts à être utilisés » a quelque peu rendu caduque.
      À bientôt

      Salutations cordiales

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